MARIE-JO LAFONTAINE.
Les trois photographies de Troubled Waters ! déclinent le corps féminin sous le registre de l’apesanteur. Soustrait à la gravité, le corps en suspension évolue dans un état de flottement, de lâcher prise. La suspension s’opère par rapport à l’ancrage, par rapport à l’espace, mais aussi par rapport au temps. La citation de Kafka « Debout sur la plate-forme du tramway, je suis dans une totale incertitude quant à ma situation dans ce monde ! » renvoie à ce flottement qui saisit l’être dans le sens où il le dessaisit.
Des correspondances secrètes, intimes, subjectives se tissent entre l’univers de Marie-Jo Lafontaine et le peintre de la Renaissance, Bernard Van Orley. Par-delà les siècles, des motifs communs circulent chez l’une et l’autre : le choix du polyptyque (souvent du triptyque), l’usage du retable, l’art du portrait, la perception de l’éternité qui transit le corps humain, corps mortel physiquement, corps immortel métaphysiquement.
Le portrait dévoile tout autant qu’il préserve un horizon de mystère.
Marie-Jo Lafontaine, Bernard Van Orley ou la peinture en eaux troubles au sens où l’artiste ouvre des portes sans éteindre le secret du passage des êtres dans le monde.
Véronique Bergen.